Le Club de la Presse Auvergne a organisé le 23 janvier 2023, à la Scop Librairie Les Volcans, à Clermont-Ferrand, une rencontre avec le sociologue Jean-Marie Charon. Cette rencontre se faisait autour de l’ouvrage écrit par ce dernier, avec Adénora Pigeolat, « Hier, Journalistes : ils ont quitté la profession ».

Un métier qui se dégrade

Cet ouvrage fait suite à un constat dressé lors des Assises Internationales du Journalisme, en 2018. Des travaux de recherches portés par l’Institut Français de la Presse, on mis en lumière qu’une carrière de journaliste durait en moyenne 15 ans. Dans « Hier, journalistes : ils ont quitté la profession », on retrouve les résultats d’une étude réalisée entre 2018 et 2020, par Jean-Marie Charon notamment, sur un panel de 55 personnes interviewées.

Avec les résultats de son enquête, Jean-Marie Charon constate un déni de ces dégradations. Notamment, par les cadres qui dirigent des journaux. En effet, Jean-Marie Charon est allé voir des cadres dans des médias d’informations, et beaucoup disaient des phrases comme « ça ne se passe pas chez nous ». Pourtant, 40 % de nouveaux entrants dans le métier le quitte avant d’atteindre les 7 ans de carrière (c’était 28 % il y a 25 ans). Le fait que des personnes formées au journalisme quittent leur métier après plusieurs années d’études montre que le problème survient une fois dans le monde professionnel. Les études se passaient souvent très bien et renforçaient l’envie de continuer sur la voie du journalisme. C’est réellement le monde professionnel qui donne envie d’arrêter.

Toujours les mêmes profils touchés

Différents profils de journalistes sont touchés par cette vague d’abandon de postes qui résultent de souvent de conditions de travail défavorables, à savoir :

  • Les jeunes : pour cause notamment de précarité, de désenchantement du métier. Les jeunes pigistes sont aussi en manque de réseaux (pour obtenir des accréditations, des rendez-vous…). Il y a peu d’autonomie et parfois peu de « terrains ».
  • Les « quadragénaires » : ressentent une perte de sens, des conditions de travail de plus en plus difficiles (cadences, horaires…) ou des éthiques peu respectées.
  • Les femmes : souvent victime de sexisme, de harcèlement avec moins de reconnaissances.
  • Les « sexagénaires » : lassitude du métier.

Même si chaque situation est différente, on retrouve néanmoins des problématiques communes, notamment le :

  • Le « Burn-out » : un « épuisement professionnel » d’après le psychologue Herbert Freudenberger. Cela se traduit par une fatigue physique et mentale. On la retrouve en grande partie chez les femmes journalistes.
  • La fatigue : entre les horaires, les cadences et la vie personnelle, il est parfois difficile de vivre de trouver un équilibre entre le travail bien fait et la vie personnelle
  • Les syndromes post-traumatiques : un cas plus rare. Ce cas touche surtout les anciens reporters de guerre.

La reconversion des anciens journalistes

Quitter la profession donne une impression de « pouvoir souffler » pour certains. Cela avec la peur de regretter ce choix choix, car le journalisme est souvent défini comme un métier passion. Sans trop de surprise, les anciens journalistes se tournent vers des métiers assez proches. Après une période de remise en question, ils s’orientent souvent vers les métiers de la communication ou l’enseignement. D’autres choisissent de développer un projet professionnel autour de leur passion : (peintures, littérature, audiovisuel…).

Le changement est possible mais tarde à se mettre en place

Comme pour d’autres secteurs, la profession doit évoluer. Pour Jean-Marie Charon, il faut revoir l’organisation du travail au sein des médias d’informations afin d’éviter la surcharge. Les structures devraient également être plus sévèrement encadrées sur le plan légal. Les directions, quant à elles, doivent devenir plus « humaines » et plus « responsables ». Pour ce faire, il est nécessaire de (re)créer du lien et de faciliter le dialogue entre les journalistes et leurs supérieurs. Enfin, un meilleur accompagnement des journalistes par des professionnels de santé permettrait d’identifier en amont les risques socio-professionnels.

La solution peut se trouver avec des collectifs, comme le Club de la Presse par exemple. Jean-Marie Charon invite aussi les journalistes à se syndiqué, car ils constate les syndicats sont trop sous-exploité. Il remarque cependant, une hausse des groupes de travail. Des pigistes qui peuvent travailler ensemble dans un même lieu par exemple.