Michaël Aguilar est un conférencier star, un as de la vente. Il a fondé « vendeurs d’élite » et publié une douzaine d’ouvrages autour des pratiques des meilleurs vendeurs du monde. Il était hier, 30 mars, à Clermont sur l’invitation de Clermont Auvergne Innovation en collaboration avec la Brasserie du Digital.

Punchline, petites séquences vidéos, blagues et exemples concrets. L’intervention de Michaël Aguilar est (très) construite de telle sorte qu’on ne voit pas passer les plus de deux heures passées dans l’amphi de Turing 22.

Autant dire que la promesse est forte: « vous allez passer les deux heures les plus importantes de votre vie professionnelle ». Et « après, vous lèverez plus, vous embarquerez plus, vous convaincrez plus ». Mais, à en croire les discussions et bonnes résolutions, glanées autour du cocktail post conférence, elle semble tenue.

L’homme aux 1300 conférences

Et donc, que raconte Michaël Aguilar ? Rien de moins, dit-il, que les 5 règles les plus essentielles pour mieux convaincre. Son propos est basé sur la compréhension des fonctions cérébrales : nos 3 cerveaux, complètement imbriqués.

  • Le fameux reptilien, celui qui est programmé pour la survie, qui assure les fonctions vitales, qui fonctionnement de manière totalement inconsciente. C’est le poste de pilotage automatique, sur lequel la conscience n’a aucun pouvoir.  
  • Le système limbique, c’est sur celui-ci que Michaël Aguilar a passé l’essentiel du temps de cette conférence sur l’Art de la Persuasion.  Le système limbique est le siège des émotions. Il en existe 6 primaires : la joie, la colère, le dégout, la tristesse, la peur et la surprise. Combinées ensemble et graduées, elles en génèrent ensemble un total de 87, positives et négatives.
  • et, le néocortex.

La peur est au centre de tout. C’est le message central de Michaël Aguilar. L’essentiel de nos décisions seraient prises pour éteindre nos peurs : celle de manquer quelque chose, le fameux FOMO, d’être mal jugé, de perdre, de regretter, de l’inconnu, de se faire avoir … la liste est quasi infinie. A l’appui de son propos, Michaël Aguilar cite Machiavel « celui qui contrôle la peur des gens devient le maître de leurs âmes »

Moins de peur, plus de plaisir

La recette commune à nos décisions revient à résoudre l’équation d’une recherche de plaisir maximale pour une douleur minimale. Déborah Small, chercheure à Wharton travaille sur ce sujet depuis longtemps. Elle compare l’efficacité sur d’importants échantillons de messages incitant à l’action en actionnant deux types d’argumentaires, plus ou moins dramatisants ou surtout, plus ou moins incarnés. Lire cet article qui en relate plusieurs, dont une menée par D.Small. En substance, on réagit plus (beaucoup plus) à un message dramatique qu’à un message positif et on est plus sensible (beaucoup plus) à un message incarné (un enfant) qu’à une statistique (3millions d’enfants) …

Les 5 règles pour ne plus rater ses négos

Règle no 1 : « La séduction précède la sélection »

Pour faire simple, le rôle du super vendeur est de réduire les douleurs de son prospect. Plus encore que lui donner du plaisir. En effet, les individus ne changeraient de comportement que lorsque la douleur de l’immobilisme est supérieure à la douleur du changement. Le meilleur argument ? Accentuer la douleur de l’immobilisme, en jouant sur les émotions négatives. Et avec un objectif : celui d’impacter fortement la mémoire, et celle-ci n’est significativement impactée que par une forte émotion.

Règle no 2  Militant

Défendre des valeurs et incarner un combat, solidement. Embarquer sur ses valeurs, c’est déplacer l’argumentaire au-delà du produit et de ses qualités intrinsèques et objectivées mais facilement comparables. Des valeurs et un combat, c’est unique, c’est émotionnel et c’est incomparable. C’est ce que font Nike, Apple ou les candidats à la présidentielle.

Règle no 3 Binaire

La simplicité, voire la simplification extrême, facilite la décision. C’est noir ou blanc, un ou zéro.

Ainsi parlait Trump « Vous êtes avec ou contre moi » ou Steeve Job au patron de Pepsi  « Vous préférez continuer à vendre de l’eau sucrée ou me rejoindre chez Apple et changer le monde ? »

Règle no 4 Grégaire

Certes, c’est naturel et instinctif : quand on ne sait pas comment faire, on fait comme les autres. Il y a eu plein d’expériences sociales pour démontrer que pour rester dans le groupe, on est prêt à beaucoup de sacrifices. Activer l’instinct peut se révéler très payant pour faire adhérer… La phrase choc ‘Tout le monde sait que …’ (sous entendu, « ah bon, pas vous? la honte !)

Règle 5 : Entrez par l’émotion sortez par la raison

Et finalement, en guise de synthèse de toutes les bonnes raisons évoquées précédemment, la punch line de Michaël Aguilar réaffirme la primauté du système limbique. Oui, les décisions sont d’abord émotionnelles. Elles viennent ensuite être « cautionnées » par le 3ème étage, le néocortex. L’analytique, celui qui abrite les fonctions de logique, de la raison et du langage. C’est celui qui, in fine, va analyser l’argumentaire, les données, les chiffres… Mais en fait, ‘juste’ pour renforcer une décision déjà prise.  

Le VC’s, un système limbique comme un autre

Si Clermont Auvergne Innovation a eu l’idée d’inviter Michaël Aguilar pour cette keynote, c’est que l’art de la persuasion est une compétence majeure à cultiver pour les start up naissantes, à fortiori peut-être lorsqu’elles naissent dans l’univers ultra scientifique et rationnel du « labo de recherche ». Pour mobiliser ses premiers clients ou embarquer des investisseurs, il faut ‘imprimer la pellicule’ – sic Michaël Aguilar – et ça, ce ne sera jamais un tableur Excel ou un descriptif ultra technique qui le provoquera.

Donc, le mantra : Entrez par l’émotion, sortez pas la raison.