Maskott est né en 2004, de l’envie d’un enseignant de biologie d’expérimenter les potentiels du numérique pour individualiser le travail des élèves et répondre aux problématiques d’hétérogénéité dans les classes. Parti du CD-Rom interactif avec vidéo, objets 3D, suivi des résultats,… la classe de Pascal Bringer a été  un peu son labo, son « premier démonstrateur terrain ». Ce goût de l’expérimentation  Pascal Bringer l’a conservé, et c’est devenu Maskott, belle PME d’une quarantaine de personnes, dont le coeur est au Puy, avec des implantations à Lyon et à Paris.  Maskott est aujourd’hui  éditeur d’une plateforme de digital learning et de contenus pédagogiques accessibles à 80000 enseignants et 8 millions de collégiens.

16 années et un confinement plus tard, où en est-on ?

L’orientation initiale n’a pas changé. En revanche, les outils sont plus performants que début 2000 ! Ce qui était techniquement compliqué il y a 16 ans ne l’est plus : aujourd’hui, les plateformes web en SAS qui permettent d’adresser les élèves où qu’ils soient, sur n’importe quel type de device, avec de la mobilité, font qu’on a un champ de réalisation beaucoup plus large.

Sur le plan technique, les choses ont beaucoup changé mais du point de vue des usages ?

Aussi. Le numérique est entré dans la vie de tout le monde, des enseignants comme des élèves, avec un niveau de pratique différencié : certaines matières sont plus encouragées que d’autres à utiliser le numérique.

Le numérique accompagne un changement de société et de position des élèves, il y a 20 ans, le discours de l’enseignant était uni directionnel, c’était le sachant en direction de la classe, qui écoutait attentivement. Aujourd’hui, on  a beaucoup plus de choses à faire passer, c’est beaucoup plus diversifié et surtout, les élèves ont besoin de plus d’interactions, d’être actifs dans leur apprentissage. L’enseignant devient un coach pour les élèves, pour les accompagner dans leurs apprentissages, pour rendre les élèves plus autonomes … Le numérique est un très bon outil pour favoriser travail en autonomie, individualiser les parcours …

Cela fait évoluer le métier de l’enseignant de manière accélérée. Ce qui peut être déstabilisant parfois. 

Justement, comment sont-ils accompagnés ?

Le numérique n’est pas une évidence pour tous les enseignants. Certains préfèrent rester sur les pratiques qu’ils avaient et qui fonctionnaient bien. Le numérique, ce sont des outils en plus, cela ne remplace pas le prof, juste le compléter.

Pendant le confinement évidemment, ceux qui étaient formés ont pu réagir plus facilement et rapidement. Ils se sont trouvé  moins en difficulté, moins isolés surtout. C’est plus difficile de se former dans l’urgence. D’ailleurs, un vaste plan de formation va être déployé pour développer les compétences de l’enseignant 4.0, pour construire une sorte de socle commun.

Claire Berger – Prof de Math à St Régis dans sa classe

D’abord, il s’agit de comprendre l’univers du numérique : à quoi il sert, pour quoi faire, quand est-ce pertinent et ensuite les outils disponibles. Canopée, initialement le ‘bibliothécaire’ de l’Education Nationale, a vu son métier évoluer vers un rôle de médiathèque et va renforcer son rôle d’accompagnement des enseignants. Il maille le territoire, il y en a dans tous les départements; c’est un rôle de proximité important.

En tant que parents, certains ont pu avoir l’opportunité de vivre l’accès à Tactiléo. Ce qui peut frapper, c’est la diversité des usages, selon les profs, selon les matières, … Comment cela fonctionne ?

Maskott, au travers de sa plateforme Tactileo, est aujourd’hui un des outils référencés par le Ministère de l’Education Nationale pour assurer la continuité pédagogique et ce pour les écoles, collèges et lycées de France. Ca fonctionne par marchés sur appels d’offre. Nous avons eu les matières scientifiques, les langues anciennes,  le français langues étrangères, … il y a d’autres acteurs pour d’autres matières.

Les enseignants ont ainsi un accès libre aux 20 000 Ressources Numériques pour l’Ecole (BRNE) validées par le Ministère. Ils peuvent soit utiliser les contenus « sur étagère » réalisés en lien avec des profs et des inspecteurs, soit utiliser la plateforme pour créer leur propre cours,  pour piocher dans les banques de ressources d’autres matières, pour utiliser des quizz, des visuels, … cela favorise la transversalité.

En fait, les ressources sont placées à leur disposition mais on respecte la liberté pédagogique… Les enseignants choisissent la manière dont ils veulent enseigner.

Concrètement, il y a toujours un effet de contamination.

Il faut qu’un enseignant lance l’usage 

L’écosystème se met en place progressivement : très souvent, l’usage démarre par un prof, qui va démontrer aux autres l’intérêt du dispositif, le partager sur ses réseaux sociaux … 

Le confinement a eu effet assez net d’accélération de l’intérêt porté à nos solutions. Nous l’avons ressenti lors de l’Université d’été LUDOVIA : beaucoup d’enseignants étaient très en recherche de solutions pratiques, très curieux, avec beaucoup de questions

Quels sont les grands enjeux ?

Là encore, pendant le confinement, on a pu voir la problématique des territoires en zone blanche qui génère une hétérogénéité de l’accès aux outils. Or,  c’est fondamental que tous les élèves soient en situation d’égalité. Il y a le volet équipements des élèves et les conditions d’accès aux contenus.

Nous avons engagé un travail de recherche avec le laboratoire de psychologie sociale et cognitive, le Labsco de l’Université Clermont Auvergne et le Rectorat. Dans le cadre d’un appel à projets ‘Espace de formation, de recherche et d’animation numérique » (e-Fran) inscrit dans le Programme Investissements d’Avenir (PIA2) Maskott s’est positionné  pour étudier les effets de nos outils qui permettent d’individualiser les apprentissages sur les résultats d’apprentisssage. Mobilisant des centaines de profs et des milliers d’élèves sur 3 ans, les résultats seront statistiquement robustes. Les premières publications soumises à des revues scientifiques reconnues montrent  que « l’on apprend mieux avec un système de tutorat intelligent comme Tactiléo et surtout, que l’on contribue à réduire la fracture sociale entre élèves« . (L’interview vidéo de Pascal Bringer)

Pourquoi ? Parce que,  quand on a une population d’élèves, il y a des différences d’origine, de niveaux et de manière d’apprendre. Quand on est enseignant, on doit souvent ré expliquer mais de façon différente. Les élèves n’apprennent pas tous  de la même façon. Avec le numérique, on peut diversifier les approches, pour certains élèves ce sera plus de vidéos, pour d’autres un parcours plus gamifié, d’autres avec plus de formalisme … le numérique permet de proposer plusieurs voix et surtout à l’élève de choisir celui qui lui convient le mieux.

Qu’est ce qui manque pour accélérer ?

C’est un tout qui doit s’enchaîner de manière cohérente : la problématique d’équipement des élèves; d’infrastructures aussi, il faut que le débit et le Wifi soient performants dans l’établissement et à domicile pour que l’élève   puisse continuer à apprendre; que les solutions soient adaptées aux portables …

On abaisse peu à peu les barrières sur tous ces sujets.

Nous avons développé Maskott AV, pour accompagner nos clients sur leur projet global puisqu’on le voit, tout est lié. Il faut que tout l’environnement soit facilitant ; nous avons donc développé un réseau de fournisseurs et une veille sur l’innovation, cela nous permet d’avoir une valeur ajoutée pour concevoir le meilleur équipement en fonction des besoins et des usages. D’ailleurs, nous accompagnons St Régis depuis longtemps mais aussi très récemment la toute nouvelle Brasserie du Digital du Puy, que nous avons équipé en salle visio très haut de gamme.

Quelles perspectives à l’international ?

Nous avions déjà des contacts avec le Canada, le Brésil, l’Afrique … Le confinement a accéléré les besoins. Par exemple, le Tchad a déployé la plateforme Tactiléo sur tout le pays, et les formations sont actuellement en cours  par Canopée France

Nous avons également rejoint le Partenariat Global pour l’Education de l’Unesco. Seule entreprise française dans cette coalition internationale (#fierté!), nous contribuons à assurer la continuité pédagogique dans le contexte de crise sanitaire. Nous intervenons au Liban et bientôt dans 10 autres pays d’Afrique, prioritairement francophones, pour pouvoir partager à la fois les fonctionnalités de la plateforme et les contenus pédagogiques.

Cette intégration aux côtés de grands noms du numérique ou de grands groupes internationaux, Maskott la doit à Microsoft avec qui ils travaillent depuis plus de 10 ans. La collaboration avec le géant mondial du logiciel a démarré avec l’équipement du premier collège de France en tablettes sous environnement Windows, à St Régis (voir notre article)…elle se poursuit depuis.

« Microsoft est une entreprise qui se développe en aidant ses partenaires, c’est leur philosophie de faire grossir leurs partenaires, y compris les plus petits… « 

Ce qui va permettre à Maskott d’ici peu, d’intégrer son LMS (Learning Management System) directement au sein du store « Teams », l’outil de visioconférence de Microsoft. Pour mettre en oeuvre ce projet, les équipes du Puy travaillent directement avec Microsoft Corp à Seattle.

Une belle reconnaissance pour la petite grenouille !