De nombreuses voix s’élèvent aujourd’hui pour pointer du doigt les inégalités de plus en plus visibles entre les Français face aux transports, notamment ceux des zones rurales et périurbaines. C’est dans ce contexte, que l’association Orbimob s’est montée avec comme fer de lance les mobilités durables territoriales. Françoise Perret-Bernard, cheffe de projet et développeuse territoriale nous présente les défis d’Orbimob pour 2024.

Nous allons parler mobilités durables en ce début d’année. Avant cela, le Connecteur aimerait en savoir un peu plus sur votre parcours professionnel….

Françoise Perret-Bernard : Je suis originaire d’Auvergne, où j’ai effectué mes études. Après avoir passé un baccalauréat scientifique, j’ai consacré trois ans à étudier la littérature anglaise avant de me tourner vers des études en communication.

Une fois mes études terminées, j’ai eu plusieurs expériences professionnelles en communication et événementiel pour la CGPME,  l’ANPE Auvergne et Canon France.

J’ai eu ensuite l’opportunité d’intégrer Vulcania, où j’ai travaillé pendant neuf ans en tant que responsable communication. A un moment donné, j’ai ressenti le besoin de relever un nouveau défi. C’est ainsi que je suis devenue responsable de projet chez BGC Toscane. 

Avec BGC Toscane, j’ai commencé à travailler sur le projet OrbiMob’ de façon indirecte. Lorsque j’ai rencontré Patrick Oliva, tout a pris sens pour moi, et j’ai rapidement compris l’importance du projet. Quand il a créé l’association et que le poste de chef de projet OrbiMob’ s’est ouvert, je me suis dit qu’il y avait un travail essentiel à accomplir en termes de communication et de sensibilisation. J’ai rejoint Patrick en janvier 2023, sans trop hésiter. 

Pouvez-vous nous présenter OrbiMob’ et son travail sur les mobilités durables ?

Françoise Perret-Bernard : OrbiMob’  est une dynamique locale qui a été lancée en 2019 et s’est rapidement développée pour devenir un acteur majeur consacré aux mobilités territoriales durables.Patrick Oliva a ensuite décidé que pour porter des projets ambitieux, il était essentiel de se structurer. C’est dans cette optique  que quatre membres fondateurs ont décidé de créer l’association. 

La mission principale d’OrbiMob’  est d’impulser et d’aider les projets de mobilité à voir le jour, en collaborant étroitement avec les acteurs publics et privés de Clermont-Ferrand, de l’Auvergne et du Massif Central . Nous poursuivons plusieurs objectifs ambitieux :

  • Éducation et Sensibilisation : Nous accordons une importance particulière à ce sujet. D’où notre rôle dans le projet « OrbiMob’ Académie » co-initié avec UCA et l’ESC et accepté dans le cadre « France 2030 ».
  • Mobility As a Service : Nous voulons aider  à simplifier l’usage des offres de mobilité sur les territoires. Il s’agit d’un aspect crucial pour faciliter l’adoption de nouvelles formes de mobilité.
  • Soutien à la création d’un duopôle technique emblématique : Le potentiel de recherche existant déjà aux Cézeaux et les projets sur Charade offrent la perspective de faire de Clermont un pôle majeur d’innovation dans les mobilités et de  favoriser la collaboration entre entreprises, chercheurs et étudiants.
  • Événementiel OrbiMob’  : Nous créons une dynamique événementielle d’envergure internationale. Les prochaines Journées OrbiMob’ , prévues du 8 au 10 octobre 2024, ambitionnent de devenir un Sommet International sur les Mobilités Territoriales Durables, qui aura lieu tous les ans à Clermont. Nous comptons solliciter des experts internationaux et les mettre en relation avec nos experts et décideurs locaux. 

Quelles sont les priorités pour OrbiMob’  pour les années 2023-2024 ?

Françoise Perret-Bernard : L’un de nos principaux objectifs pour 2023-2024, en lien avec le Commissariat de Massif, concerne le ferroviaire. Nous avons déjà travaillé avec l’université Clermont Auvergne au concept d’un RER métropolitain sur la croix ferroviaire clermontoise. La première phase de ce projet présentée aux élus  a consisté à  produire un document d’orientation sur ce que pourrait être un RER adapté au territoire et novateur. Maintenant, nous travaillons à capter l’attention de l’Etat et des décideurs locaux sur la pertinence d’un tel projet et sa réplicabilité possible (au moins partielle) dans d’autres villes du Massif Central.  En parallèle, nous voulons nous attaquer  au sujet du maillage ferroviaire au sein de l’ensemble  du Massif central, une zone qui présente des défis spécifiques de baisse de l’offre.  Nous sommes conscients que le développement du rail dans cette région ne dépend pas uniquement de nos actions, mais nous pouvons impulser un regard nouveau.

Un autre axe majeur est l’accélération de l’électrification multimodale dans le Massif central. Nous organisons dès cette année des sessions de formation pour les élus et prévoyons de publier un guide sur l’électromobilité. Ce guide traitera des avantages et des inconvénients de l’électromobilité, ainsi que des progrès à réaliser pour rendre la transition électrique plus accessible et attrayante. Ces initiatives sont réalisées en collaboration avec des partenaires tels qu’Enedis, Avere et France Mobilités.

C’est déjà une feuille de route assez dense autour des mobilités durables, avez-vous d’autres projets en cours ?

Nous allons également lancer un projet sur la biomasse et les bioénergies. Le Massif central est le poumon vert de la France et son principal puits de carbone. C’est donc un lieu idéal pour accueillir des assises sur les questions d’adaptation, de production d’énergies durables et de captation de CO2.

Nous sommes également,dans la phase de concrétisation du projet “OrbiMob’ Academy » sous le pilotage d’UCA. C’est un programme de formation interdisciplinaire sur les mobilités s’étendant du niveau Bac -3 à Bac +8. Il comprend des modules généraux  et des options de spécialisation. Dans un premier temps il s’adressera progressivement à tous les étudiants de niveau licence, toutes disciplines confondues, puis diffusera vers les autres niveaux. Il sera également ouvert aux salariés, aux élus, aux experts, aux professeurs et aux intervenants d’entreprises. 

La question de la santé publique est peu présente dans le discours sur les mobilités durables. Comment traiter la question de santé publique ?

Françoise Perret-Bernard : En effet, la mobilité est étroitement liée à la santé publique. Il existe un double enjeu, d’un côté la lutte contre le manque d’activité physique et de l’autre la lutte  contre la pollution de l’air. 

Nous avons récemment répondu à un appel à projets de l’ADEME pour mener une action contre la pollution de l’air au cœur de la métropole clermontoise. Une très grande partie des habitants de la métropole pourraient réaliser une partie de leur trajet quotidien à pied ou à vélo. Pourtant, beaucoup ne le font pas, souvent parce que prendre sa voiture thermique est une habitude. 

Partant de cette idée, nous avons développé le défi « Je dépollue sur 30 jours » pour amener les citoyens à transformer leurs usages. Nous encouragerons bientôt des volontaires à laisser leur voiture thermique dans la mesure du possible et à essayer de jouer le jeu pendant 30 jours. Nous ciblons particulièrement les salariés pendulaires et les étudiants. Ils pourront suivre leurs efforts avec des indicateurs sur la qualité de l’air de la Métropole, les émissions non émises, le nombre de pas effectués, le nombre de kilomètres parcourus à vélo, et les calories perdues. etc.

L’application permettra aux utilisateurs de cumuler des points, qui seront ensuite convertis en bons d’achat auprès des commerçants locaux. Nous établirons également un classement des 10 meilleurs volontaires, à qui nous offrirons des vélos électriques et des vélos. L’objectif est de motiver les habitants du grand Clermont  à participer et à changer leurs habitudes. Nous avons déjà reçu des réactions positives à cette initiative.

Sur notre territoire, quels projets innovants autour des mobilités durables ont retenu votre attention ?

Françoise Perret-Bernard : Je trouve que l’approche de la société GCK, basée à Lempdes, est exemplaire dans ce domaine. Le groupe développe des technologies novatrices pour les mobilités de demain, et ses projets sur Charade sont enthousiasmants. Du côté de la recherche, on retrouve l’UCA avec la perspective d’une expérimentation de route inductive connectée. Un autre acteur local important est Monkey Factory, connu pour son expertise et son rôle incontournable dans l’aide aux voyageurs.

Ce qui est remarquable, c’est le nombre de personnes qui imaginent des choses incroyables.Mais elles ne sont pas suffisamment mises en lumière. Notre rôle avec OrbiMob’ est de les aider, en montrant précisément que notre territoire regorge de pépites et veut être reconnu pour cela. C’est un défi collectif. 

C’est l’instant carte blanche. Y a-t-il quelque chose que vous souhaiteriez ajouter ?

Françoise Perret-Bernard : Oui, absolument. Je tiens à souligner que nous avons un magnifique territoire où l’innovation est omniprésente. Cependant, j’ai souvent l’impression que, bien que nous soyons fiers de nos réalisations, nous ne sommes pas toujours enclins à les partager, à les exposer aux yeux des autres. Je pense qu’il est essentiel de nous ouvrir davantage et de communiquer avec les autres. Pour avancer et progresser dans tous les domaines, il est crucial de dialoguer et d’échanger. C’est absolument essentiel pour de meilleures collaborations et une plus grande visibilité de nos efforts et de nos innovations.