Orbimob’ est une association basée à Clermont-Ferrand, qui s’est donnée pour mission d’aider les multiples acteurs des mobilités à structurer une transformation réussie. Le mardi 4 avril, dans le cadre de la Clermont Innovation Week, elle a organisé une journée dédiée afin de partager sa vision et son ambition. Plus de deux cents acteurs de cet écosystème se sont retrouvés pour ce temps d’échanges et de networking.

Orbimob’ : Les mobilités territoriales, une approche systémique

La mobilité territoriale se réfère à la façon dont les gens et les marchandises se déplacent d’un endroit à un autre, en particulier à l’intérieur d’une région ou d’un territoire géographique. Cette notion peut inclure une variété de modes de transport tels que la marche, le vélo, la voiture, les poids-lourds, le bus, le train ou encore l’avion.

La mobilité territoriale est un aspect important de la vie quotidienne des gens, car elle leur permet d’accéder à des emplois, des écoles, des magasins, des lieux de divertissement et de loisirs, des services de santé et bien plus encore. C’est pourquoi elle est étroitement liée à la qualité de vie des individus et à la vitalité économique des territoires.

Elle peut également avoir des impacts significatifs sur l’environnement, la sécurité routière, la congestion des villes, la santé publique et les émissions de gaz à effet de serre.

Orbimob’ : La transition n’est pas qu’un sujet environnemental

Pour Patrick Oliva, président de l’association Orbimob’, il est très risqué de limiter la nécessaire transformation des mobilités territoriales au seul enjeu de la décarbonation.

Cette transformation doit s’articuler autour de huit enjeux majeurs.

  • accès pour tous, partout
  • la préservation de la Terre et du vivant (biosphère)
  • une meilleure santé (pollution, sédentarité)
  • la sécurité individuelle
  • la sécurité nationale
  • la création d’emplois
  • l’épanouissement personnel
  • l’épanouissement collectif

L’enjeu des mobilités territoriales pour la candidature de Capitale Européenne de la Culture

Le massif central s’étend sur 85 000 km2, soit la superficie du Portugal. Il est composé de villes moyennes, de zones rurales et de montagnes. En cela, il est assez typique de ce que l’on peut retrouver partout dans le monde. Pour Patrick Oliva, il peut sans aucun doute être le laboratoire d’innovation et de transformation des mobilités durables.

D’ailleurs, le territoire va devoir rassurer le jury de la Capitale Européenne de la Culture sur sa capacité à accueillir et à transporter les millions de personnes qu’une victoire pourrait drainer. Il s’agit de trouver rapidement des moyens frugaux, mais efficaces, pour alimenter le dernier dossier de candidature qui doit être déposé à l’automne.

Les mobilités en ville, un état des lieux qui ne va pas dans le bon sens pour Orbimob’

Aujourd’hui encore l’investissement principal se fait sur la route avec une dépendance aux énergies fossiles. On investit un peu sur les transports en commun, très peu sur le vélo et encore moins sur le piéton.

Pourtant, pour être à la hauteur des enjeux environnementaux et sociétaux, il faudrait renverser les dotations. Investir massivement sur le piéton ainsi que sur le cyclable, continuer le redéploiement des transports en commun en incluant l’approche multimodale, et entamer réellement l’électrification des mobilités urbaines.

Pour suivre l’exemple de villes européennes qui ont réussi leur transformation, la part du piéton et du cyclable devrait atteindre 70%. Le dernier Plan de Déplacement Urbain 2030 pour la ville de Clermont-Ferrand n’est pas à la hauteur des enjeux. La voiture passerait de 46% à 37%, la part du piéton stagne à 40%, les transports en commun passent de 12% à 18%, tandis que le vélo “bondit” de 2% à 5%.

Pour Patrick Oliva, “si la part du piéton/cycliste n’atteint pas au minimum 60%, alors on a une vision passéiste de la mobilité. Avec cette projection, la part pour la ville de Clermont-Ferrand serait seulement de 45%.”

Les mobilités rurales, d’autres objectifs à atteindre

Dans les territoires ruraux, il faudra forcément continuer de miser sur la route. Pour autant, il faut impulser une évolution énergétique pour aller vers l’électro mobilité et les énergies complémentaires qui nous libèrent des énergies fossiles”, insiste Patrick Oliva.

Le vélo à assistance électrique est une formidable opportunité pour les territoires ruraux et montagnards, on doit accompagner ce développement. Enfin, il faut réanimer les transports en commun, notamment le ferroviaire”.

A noter, que le président d’Orbimob indique que toutes ces transformations doivent s’appuyer sur le numérique afin de proposer une mobilité servicielle, la clé pour les territoires ruraux.

Orbimob’ : Transformer les mobilités territoriales en ville en 10 points

  • faciliter la marche grâce à des zones piétonnes sanctuarisées
  • développer des pistes cyclables réglementées
  • systématiser le 30 km/h en centre ville (flux homocinétique)
  • accélérer l’électrification des deux roues
  • développer les transports collectifs informels en plus des transports collectifs formels. Il faut garantir le transport en commun de façon fiable.
  • pousser l’organisation d’une logistique “zéro pollution locale” sur les derniers kilomètres
  • favoriser le mode électrique (y compris hybride rechargeable) des voitures, bus et camions
  • organiser la multimodalité, dont la billetterie intégrée
  • gérer la transition ZFE (Zones à Faibles Émissions), puis ZTFE (Zones à Très Faibles Émissions) enfin ZZE (Zones Zéro Emission), d’ici 20 ans
  • créer une fiscalité fortement incitative pour cette transition

Orbimob’ : Transformer les mobilités territoriales en zones rurales en 10 points

  • mutualiser les transports logistiques routiers (qui explose avec le développement du e-commerce) et favoriser les circuits courts
  • proposer des véhicules électriques abordables, plus légers (15kw/100km). Ils n’ont pas besoin de pouvoir rouler à 250 km/h
  • garantir un service 24/7 sur les trains, avec une coordination multimodale
  • développer une offre alternative de carburants gazeux et liquides
  • développer le concept de Mobility As A Service comme fer de lance contre l’inéquité territoriale. Il s’agit de « proposer à l’échelle d’un territoire, une information intermodale et multimodale centralisée et en temps réel sur l’ensemble des modes de déplacements possibles, y compris la voiture, une tarification adaptée au déplacement demandé, une vente en ligne des billets » (source CEREMA)
  • orienter les poids lourds vers des moteurs à hydrogène et ou des motorisations au biométhane
  • développer le télétravail et les espaces de travail partagés (tiers lieux)
  • transformer les TER diesel en électriques
  • accélérer la R&D sur des solutions prometteuses autour de l’induction aérien et le maritime, le fluvial et le lacustre
  • créer une fiscalité incitative

Un imaginaire collectif à inventer

Pour embarquer massivement toutes les parties prenantes dans ces transformations de nouveaux récits doivent être imaginés. “450 villes dans le monde l’on fait, donc c’est possible”, affirme Patrick Oliva.

C’est l’approche qu’a choisie les Monts qui pétillent, une association du Parc du Livradois-Forez, lauréate de l’appel à projet “Avenir Montagne Mobilité”.

Nous avons associé les collectivités et les citoyens à notre démarche en misant beaucoup sur l’imaginaire. A quoi ressemblerait une mobilité territoriale rêvée? En utilisant le rêve, cela permet de favoriser les échanges. En effet, on ne peut pas dire à quelqu’un “mais ton rêve, il est nul”. Grâce à cette approche, nous avons pu faire dialoguer des personnes qui n’ont pas l’habitude de se côtoyer”, détaille Blandine Chazelle, co-fondatrice des Monts qui pétillent.

Les clés de la transformation des mobilités territoriales sont désormais identifiées, il ne reste plus qu’à l’écosystème local de s’en emparer.