Quelle place pour l’Économie Sociale et Solidaire dans l’avenir de nos territoires ? C’est la question que nous nous posons tout au long de ce dossier spécial proposé en collaboration avec la collectivité territoriale Riom Limagne et Volcans. Le 24 et 25 mars prochain, la RLV propose son 1er forum de l’ESS à Riom. L’occasion de faire un focus sur un pan essentiel de l’économie des territoires encore trop méconnue.

Première rencontre avec Philippe Gaillard, maire de Chambaron sur Morge et Vice-Président délégué à l’Enfance Jeunesse et à la Politique de la Ville pour Riom Limagne et Volcans

Philippe Gaillard, parlez-nous un peu de votre parcours…

Je suis un pur produit RLV. Mon père a été maire de la commune de Cellule où j’ai toujours vécu. J’ai fait toute ma scolarité à Riom avant de poursuivre mes études en gestion d’entreprise aux Cézeaux à Clermont-Ferrand. Grâce à cet ancrage très fort, j’ai pu tisser de nombreux liens au fil des années. On peut dire que je connais beaucoup de monde sur le bassin de Riom.

Après une première expérience professionnelle dans le monde de la banque et de l’assurance, j’ai ajouté une corde à mon arc avec le volet immobilier.

J’ai toujours eu envie de m’impliquer pour mon territoire, ma commune. Je suis élu depuis 1995, d’abord en tant que conseiller, puis adjoint, et, depuis 2014, comme maire d’une commune nouvelle Chambaron sur Morge. Elle est issue de la fusion en 2016 de Cellule et de La Moutade. C’est à ce moment que j’ai décidé d’arrêter mon activité professionnelle pour me consacrer uniquement à mon travail d’élu.

Vous êtes également Vice-Président délégué à l’Enfance Jeunesse et à la Politique de la Ville pour Riom Limagne et Volcan…

J’ai la chance d’avoir beaucoup de jeunes couples avec enfants sur ma commune et c’est un sujet sur lequel je suis à l’aise. Par ailleurs, le volet cohésion sociale est également une question qui m’est chère. En effet, lors de la fusion des deux communes de Cellule et La Moutade, ça a été une période assez complexe. Il a fallu aller à la rencontre de tous les habitants pour leur expliquer le projet et la démarche. C’est une expérience humaine très riche qui m’a permis d’échanger avec des personnes que je ne rencontrais pas forcément au quotidien. Cela a encore renforcé ma certitude sur l’importance du lien social dans le développement des territoires.

Vous parlez aujourd’hui au nom de RLV pour présenter la démarche ESS. Quelle est votre vision ou définition de l’Économie Sociale et Solidaire ?

Je pense que c’est une autre manière de voir le monde. C’est un rapport différent à l’économie, puisque l’on met l’humain au centre de la démarche. Néanmoins, il faut être conscient que cela peut déranger, car l’ESS remet en cause des modèles économiques prédominants. Le côté alternatif est parfois mal compris, voire même rejeté par une partie du monde politique, économique, et même du grand public.

Pourtant, c’est un modèle d’avenir qui répond aux besoins et aux enjeux sociétaux et environnementaux d’aujourd’hui et de demain.

Pourquoi RLV décide aujourd’hui de mettre en place un forum dédié à l’ESS ?

Les sujets de l’économie vertueuse, de l’économie circulaire ou encore de l’économie sociale et solidaire sont au centre des préoccupations de RLV. C’est une ambition partagée par tous les élus et identifié dans le projet de territoire.

La politique de la ville (illustrée sous le vocable de cohésion sociale à RLV) est devenue une compétence pour la communauté d’agglomération en 2017. C’est encore très neuf et il y a besoin d’acculturer toutes les parties prenantes. Avec le coup d’arrêt dû au Covid, nous avons besoin aujourd’hui d’accélérer sur ce sujet et l’Économie Sociale et Solidaire fait partie intégrante de la cohésion sociale.

Il y a besoin de faire se rencontrer tous les acteurs qui contribuent au développement vertueux de nos territoires. Aujourd’hui, nous sommes très nombreux à nous mobiliser, néanmoins, nous naviguons souvent dans des écosystèmes un peu cloisonnés. Avec RLV, nous pensons qu’il est nécessaire de créer des conditions pour favoriser les rencontres et les échanges.

C’est ce que nous avons voulu faire avec ce premier forum de l’ESS. Nous souhaitons mettre autour de la table, les élus, les entreprises dites traditionnelles et celles de l’ESS. D’ailleurs, en amont, nous avons contacté les institutionnels pour savoir quel regard ils portaient sur cette initiative. Nous avons eu de très bons retours du Département, de la Région et de l’Etat. Finalement, nous sommes tous convaincus de l’intérêt d’une telle démarche et le forum est l’amorce d’une dynamique plus large.

Quels sont les objectifs de ce forum de l’Economie Sociale et Solidaire qui se déroule sur deux jours ?

Le premier jour est dédié aux professionnels et aux élus. En 2023, il y a encore une méconnaissance de ce que peut être l’ESS et des acteurs qui œuvrent dans ce domaine sur notre territoire. Il nous semble important de poser les bases d’un socle de connaissances partagées sur ces questions.

Aujourd’hui, le monde économique est en pleine mutation. Il doit se transformer pour faire face aux défis de demain. Les entreprises de l’ESS travaillent sur ces enjeux depuis très longtemps. Pour les chef.fes d’entreprise qui le souhaitent, l’ESS peut être un moteur pour avancer plus vite, pour avoir un temps d’avance sur ce qui se profile pour demain.

Pour autant, aujourd’hui, il y a encore de nombreux freins à lever. Nous ne sommes pas en train de dire que l’ESS est la solution magique à tous les problèmes de nos sociétés contemporaines. En revanche, l’ESS fait certainement partie de la solution.

Vous avez également choisi de dédier la matinée du samedi au grand public, pourquoi ?

Les entreprises de l’Économie Sociale et Solidaire s’occupent de secteurs qui sont au cœur de l’actualité. Ce sont des sujets auxquels les français sont sensibles puisque cela touche leur quotidien. Nous souhaitons leur montrer ce qui se passe aujourd’hui sur notre territoire sur les enjeux de biodiversité, d’économie circulaire, d’autonomie des personnes âgées, etc. Bien sûr que la route est encore longue, mais il existe déjà de nombreuses initiatives vertueuses sur le territoire. Finalement, c’est un message d’espoir pour l’avenir.

Vous avez parlé des objectifs, mais quels sont les enjeux derrière ce forum de l’Economie Sociale et Solidaire ?

Nos sociétés font face à des crises successives qui les fragilisent. Tous les secteurs sont touchés et celui de l’ESS ne fait pas exception. La plupart des acteurs de l’ESS ont un modèle économique qui combine subventions et chiffres d’affaires. Nous souhaitons renforcer ce secteur économique, le pérenniser et le valoriser. Je ne suis pas le seul à être convaincu que l’Économie Sociale et Solidaire est absolument essentielle, puisqu’elle mêle deux enjeux majeurs, le développement économique et la cohésion sociale.

A quoi ressemblerait un avenir où l’ESS se serait développée comme vous l’espérez ?

Dans l’idéal, dans ce futur-là, il n’y aurait plus besoin d’un forum de l’ESS. Ce serait un secteur complètement intégré dans le quotidien des entreprises et des habitants. Des liens forts se seraient tissés avec les collectivités locales et les élus.

Nous aurions pris conscience que l’économie ne doit plus être la somme d’intérêts individuels, mais doit également servir l’intérêt général.

Ce serait finalement un modèle de société où l’on aurait une juste répartition de la valeur, où l’humain recevrait autant que ce qu’il apporte.

C’est l’instant carte blanche, quelque chose à ajouter ?

Nous comptons beaucoup sur ce forum pour initier une nouvelle dynamique avec toutes les parties prenantes. Avec ce forum, nous créons les conditions pour que les acteurs se rencontrent. Ce n’est pas une action de communication, c’est quelque chose en quoi nous croyons sincèrement. Il ne s’agit pas d’opposer les modèles, mais de permettre des complémentarités. L’ESS est un super levier pour engager le changement dans les entreprises et les collectivités.

J’ajouterais que les secteurs de l’ESS sont aujourd’hui très prisés par les jeunes générations. Soutenir ce type d’entreprises et de structures, c’est montrer aux jeunes que nous prenons au sérieux les sujets qui leur semblent essentiels. Que nous sommes toutes et tous en train de construire un avenir souhaitable pour eux, les générations futures.