« Historiquement, le financement bancaire et l’innovation ne vont pas de pair. Une innovation est un nouveau produit ou un nouvel usage, le banquier préfère ce qui est certain. Il est rassuré par un historique et un CA déjà réalisé. » C’est finalement le point de départ de cette matinée organisée par Axelera autour de l’optimisation des leviers de financement pour l’innovation.

Toutes les banques ont mis en œuvre des dispositifs d’accompagnement de l’innovation. Pour autant, pour les entrepreneurs et les porteurs de projets, il est parfois difficile de comprendre ce qui motive l’acceptation ou le refus d’un dossier de financement du secteur public et bancaire. Aujourd’hui, le financement des startups se fait dans une logique partenariale. Chaque acteur intervient à des moments-clés du développement de l’entreprise. BNP-Paribas et BPI France nous proposent un exercice de synthèse pour mieux comprendre le financement de l’innovation de la création à la commercialisation.

La place de la banque dans le cycle de vie de la start-up

A la création d’une start-up, on est sur une logique de risques et non de flux. A cette étape, ce sont plutôt les actionnaires et les subventions publiques qui viennent accompagner le projet du dirigeant.
La seconde phase, elle, est souvent consacrée à la R&D. C’est une partie très risquée et encore et loin du marché. C’est toujours la puissance publique qui soutient l’entreprise.

Le rôle de la banque débute sur la phase d’amorçage. Elle a un effet de levier sur les autres sources de financements et permet de compléter le premier tour de table.
Ensuite, on retourne dans une configuration plus classique de financement dans les phases développement et maturité.

La phase d’amorçage : La vision de la banque a évolué depuis 20 ans 

Le secteur bancaire s’est professionnalisé petit à petit dans sa compréhension du cycle de vie d’une start-up. Désormais, on sait qu’à l’amorçage, une start-up navigue en terrain incertain sur la partie accès au marché et revenus. En revanche, elle va avoir beaucoup plus de visibilité sur les dépenses à engranger. C’est-à-dire qu’ici le banquier va pouvoir faire une analyse de la consommation de cash. Pour pouvoir accompagner les startups dans cette phase, les banques doivent travailler en écosystème en cumulant les sources de financements. 

Le rôle du banquier : un autre regard sur le projet

Lorsque le banquier étudie un dossier, il a une vision sur le long terme. Il va regarder d’autres indicateurs et apporter un éclairage complémentaire à ceux des investisseurs et de la PBI. 

“En insistant sur un plan de financement sur deux ans, le banquier permet également d’éviter certains écueils. Si vous avez mal planifié vos besoins en cash, il vous sera difficile de demander une rallonge à la fin du prêt, même si vous êtes très proche de votre mise sur le marché. Le rôle du banquier, c’est de vous aider à anticiper pour que vous puissiez ensuite vous concentrer sur votre projet” souligne Nathalie Depeufeilhoux.

source : Le financement bancaire pour une entreprise innovante. Axelera 10/05/22 CIW

La BPI un acteur indispensable dans le cycle de vie de l’innovation 

Pour la Banque Publique d’Investissement, plus les liens se tissent tôt avec la start-up, plus il sera facile d’accompagner son développement ultérieur. La BPI se positionne très en amont, à travers la Bourse French Tech qui permet de financer les études de faisabilité ou techniques pour s’assurer que tous  les voyants sont au vert.
Sur la phase de développement, le prêt innovation R&D et l’avance récupérable permettent de consacrer une enveloppe de temps “humain” interne et externe pour le volet R&D.  Point de vigilance. Il est important de se rapprocher de la BPI dès la création de l’entreprise. Toutes les dépenses ante-dossier ne pourront pas être prises en compte. 

La Deeptech : une thématique forte de BPI France et en Auvergne

La BPI France a choisi de renforcer son accompagnement pour les start-ups Deeptech. Elles vont pouvoir mobiliser les mêmes dispositifs avec des enveloppes plus conséquentes (parfois triplées). Néanmoins, elles doivent d’abord obtenir une qualification Deeptech auprès d’un comité spécifique. 

Le prêt d’amorçage et prêt d’amorçage investissement destinés aux entreprises innovantes s’activent avant la première levée de fonds, mais également après, afin de conforter la trésorerie du besoin en fonds de roulement. 
Dans la phase de commercialisation et d’industrialisation, la BPI propose un prêt Innovation FEI qui peut également faciliter l’obtention d’un prêt bancaire.

source : Le financement bancaire pour une entreprise innovante. Axelera 10/05/22 CIW

La start-up 50% projet / 50% humain

La dimension humaine dans un projet d’innovation est primordiale. L’écosystème d’accompagnement va être attentif à la posture du fondateur et de son équipe. Dans un projet de start-up, il faudra faire face à de nombreux chocs exogènes. Il faut que l’équipe soit en mesure d’anticiper et de pivoter si nécessaire. 

Pour les financeurs, prendre les bonnes décisions et bien s’entourer, c’est aussi important que la dimension marché. C’est rarement le produit qui est responsable de la faillite. Bien souvent, elle survient suite à une mauvaise trajectoire décidée par l’équipe.

Peut-on prévenir l’échec dans le monde de l’innovation ?

L’échec fait partie de l’univers de la start-up. 80% des innovations connaissent un échec. La raison principale de ces faillites vient du fait qu’elles ne répondent pas vraiment aux besoins de l’utilisateur. “Pour minimiser ce risque, il est absolument indispensable de travailler ces aspects, bien en amont de la R&D” précise Nicolas Absyskey, du cabinet de conseil du même nom.

“Il faut reconnaître qu’en France, si un dirigeant fait faillite, cela aura un impact du côté du banquier. Une défaillance d’entreprise signifie souvent qu’il sera difficile de reprendre un nouveau mandat social.
Aux Etats-Unis, au contraire, on considère qu’un dirigeant qui a planté une boite est un dirigeant plus expérimenté. Il ne refera pas les mêmes erreurs, saura mieux préserver sa trésorerie et identifier les lignes rouges.
En ce qui concerne l’accompagnement psychologique du dirigeant pendant le développement du projet, il faut se tourner vers les incubateurs et les accélérateurs. Leur méthodologie et la dimension collective des promotions d’incubés ou d’accélérés est une vraie richesse pour les entrepreneurs.”
ajoute Nathalie Depeufeilhoux

Le pivot ne doit pas être réservé aux start-ups

Dans le monde de l’innovation, le dirigeant est conscient, ou s’il ne l’est pas, on lui rappelle régulièrement, de la nécessité de pivoter. Statistiquement, une start-up pivote 3 ou 4 fois avant de trouver son marché. 
Pourtant, le pivot devrait également se développer dans les autres sphères économiques. Pour ce nouveau dirigeant de start-up issu de l’économie traditionnelle “Toutes les entreprises à un moment donné doivent pivoter. Ne pas innover, ne pas pivoter, c’est mourir, à plus ou à moins long terme… et ce n’est pas qu’une histoire de start-up”.