Emilie Chanseaume et Céline Gryson ont  créé ensemble Nutrifizz en 2010. Depuis 10 ans, Emilie l’auvergnate et Céline la Bretonne, mènent leur barque, affrontent les tempêtes et profitent des vents portants.

C’est quoi Nutrifizz, en quelques mots ?

C’est une agence de conseil stratégique et d’accompagnement opérationnel spécialisée en nutrition auprès de tous les acteurs de l’agro alimentaire. Nutrifizz s’adresse à tous types d’entreprises pour des produits de grande consommation ou pour des publics plus spécifiques, avec une proposition en tryptique:

  • Valoriser, en identifiant les caractéristiques intéressantes des produits
  • Reformuler un produit pour l’adapter au mieux aux attentes
  • Développer des produits qui répondent aux attentes et aux enjeux de santé publique. Par exemple en ce moment, nous travaillons beaucoup autour du végétal.

 Thomas Edison disait  « Je n’ai pas échoué. J’ai simplement trouvé 10.000 solutions qui ne fonctionnent pas»,  on aimerait connaître l’envers de votre décor, vos 10000 solutions qui n’ont pas fonctionné. Si on reprend les étapes clés du parcours d’entrepreneurs, est ce que vous avez  des anecdotes à partager sur …

Votre premier partenaire ? Vous l’avez choisi ou trouvé comment ?

Nous formons un duo, depuis le début. 

On partageait le même bureau  au CRNH pendant notre thèse en nutrition humaine, on s’entendait bien: mêmes valeurs, même parcours 100% universitaire. 

Nous avons suivi un module création d’entreprise innovante, organisé dans le cadre de l’école doctorale pour ouvrir les perspectives aux jeunes doctorants, leur montrer d’autres voies… 

Nous n’étions pas du tout pré destinées. Vu notre parcours, ce n’était pas du tout le chemin logique. C’est assez récent,  ces 5-6 dernières années, que la sensibilisation à l’entrepreneuriat soit vraiment forte partout. Mais pour nous, cela a été le déclic : on ne se projetait pas forcément comme entrepreneur mais nous avions l’envie de voir autrement notre avenir professionnel.

Vos premiers pitchs, par exemple, vous vous souvenez de situations particulièrement cocasses ou gênantes ? 

Entre le déclic et la création, il s’est écoulé une année mais ensuite, ça s’est accéléré. Nous sommes passées en  Comité Innovergne, pour intégrer Busi. En fait, pour ce premier pitch comme pour les suivants, on s’est senties… décalées.

(Rires)

Par exemple, nous sommes allées au concours national Talents avec un plateau de fromages d’Auvergne,  pour montrer qu’on pouvait mieux valoriser les produits AOC par exemple sans toucher à leur cahier des charges. On parle du probiotique d’Activia ou de certains produits riches en Calcium… ajouté:  réglementairement, les fromages AOP d’Auvergne sont source de calcium, il faut juste être en capacité de l’identifier et savoir le mettre en avant.

En fait, pour ces pitchs, nous n’avions aucun des codes, n’étions pas structurées, mais on était pleine d’énergie, un peu naïves aussi sans doute. On n’avait peur de rien, deux nanas, de moins de 30 ans, pas en costard (ni tailleur) … nous étions vraiment dans le monde des bisounours. En fait, nous étions sans doute désarmantes de fraîcheur. Mais en même temps, Docteurs en Nutrition Humaine. 

En fait, on forçait la sympathie ! 

L’autre chose qu’on peut dire par rapport aux pitch c’est que pendant 5 ans après la création, on a pitché  en série pour raconter ce que c’était d’entreprendre en tant que femmes et en tant que Docteurs !

Votre premier rdv avec un banquier, bon ou mauvais souvenir ? et maintenant ?

Rien de particulier, il ne comprenait pas ce que nous faisions mais ça s’est toujours bien passé. 

Juste une petite anecdote, nous étions lauréates du Concours de l’Espace Infos Jeunes, et le prix nous a été remis par le Crédit Agricole. Pour notre premier rendez vous au crédit Mutuel, que nous avions déjà choisi, pour déposer nos papiers nous sommes allées … au crédit Agricole. Le premier rendez vous à la banque était un rendez vous … manqué !

Mais globalement, au-delà de la banque, nous avons toujours été soutenues par l’écosystème :  AT2i+, Auvergne Active, … 

Votre premier client est ce que vous vous en souvenez précisément ? genre son nom, la date, la commande ? Est-ce que vous y repensez parfois ? 

 

Notre tout premier client était une association  basée dans le Cantal: 170€ de chiffre d’affaire ! 

On y a mis autant de volonté et d’énergie que pour des clients plus importants. C’était une action orientée santé publique, comme le second client, l’Assurance Maladie, pour laquelle on a répondu à un  appel d’offre important pour nous, sur des modules de formation. On a testé, on s’est éparpillées: c’était une activité très chronophage, pas très en phase avec nos univers, pour laquelle nous n’avions pas le bon réseau, pas les bonnes clés … On s’est vite rendu compte que ce n’était pas là  qu’on révélait le mieux nos expertises.

Lactalis a été le premier vrai contrat en lien avec notre positionnement voulu même si la mission n’était pas complètement exaltante, cela nous a apporté une première référence sérieuse, une  caution qui a eu du poids pour les autres.

En fait, il nous aura fallu 3-4 ans pour arriver à faire des projets qui aient vraiment du sens tel qu’on l’entendait, pour des PME et des entreprises de taille intermédiaire. Elles nous ont fait confiance et n’ont pas eu peur de notre expertise scientifique. Pour Convivial par exemple, nous sommes intervenues  à la fois sur un audit nutritionnel des produits et un accompagnement à la stratégie de développement en matière d’innovation et de valorisation.

Puis nous sommes très vite passées à des clients nationaux. 

Votre premier gros conflit professionnel, c’était  ? comment vous gérez maintenant ?

Pareil !

En fait, ce premier conflit nous a aidés à choisir une posture. Nous avions travaillé pour un chef cuisinier, renommé, qui ne nous payait pas. On a pas mal hésité : il était connu, si on poursuivait, il risquait de nous griller dans le secteur mais par ailleurs, comme il était connu justement, si on envoyait le message que nous pouvions bosser et ne pas être payées…  

Donc on n’a pas lâché et … on a eu gain de cause. Il ne nous en pas voulu puisqu’il nous a conseillées à un de ses contacts. 

Votre premier recrutement, bon choix  ou cata ?  Aujourd’hui, vous êtes combien ? Une astuce ?

Ahhhh Notre première stagiaire dépressive …  elle a été notre première erreur de casting. Ensuite, notre premier vrai recrutement s’est bien passé mais c’était trop tôt. Nous avions la conviction que nous devions être en veille constante et n’avions plus le temps de nous y consacrer; nous avons donc recruté sur ce poste, stratégiquement c’était une bonne décision mais la trésorerie n’a pas suivi le même rythme… 

Et enfin, quand nous avons eu les moyens de nos ambitions, nous avons  appris à recruter. Une personne de l’Université spécialisée en Ressources Humaines nous a accompagnées : elle nous a appris à faire une fiche de poste, à sélectionner des candidatures, à mener des entretiens sans avoir de difficultés à poser les bonnes questions …. et à trouver une perle : la seconde Emilie avec qui nous formons maintenant un trio de choc !

Aujourd’hui, notre problématique serait plutôt de fidéliser les salariés : nous sommes une petite équipe, nous ne pouvons pas offrir de progression de carrière. De fait, nous recrutons des profils juniors, par le biais d’un stage, ils se forment à nos côtés et quand ils sont autonomes … ils se font débaucher ! 

Votre premier pivot ?

Nous n’avons pas vraiment vécu de pivot mais plutôt des nouveaux cycles, tous les  5 ans. Au terme du premier cycle, nous nous sommes recentrées sur des activités sur lesquelles nous étions plus efficaces, plus à l’aise, plus en phase aussi.

Une entreprise de service ne présente pas un développement  rapide comme une start up: elle doit d’abord faire ses preuves, être reconnue et ensuite, elle peut être plus créative

Doucement mais surement.

Aujourd’hui, nous allons franchir une nouvelle étape : jusqu’à ce jour, nous conseillons nos clients sur la création de nouveaux services ou de nouveaux produits. Nous allons désormais créer notre propre structure dédiée à porter nos idées de produits innovants, de la conception à la commercialisation.

Il reste encore des aspects à finaliser ; nous allons sous traiter la production, mais ensuite, il faudra définir les conditions de commercialisation, sous notre marque ou sous licence; ces points là sont à l’étude en terme juridique, de propriété intellectuelle …

Notre premier produit est déjà bien avancé.

Il s’agit d’un produit fermenté. La recette a été testée selon un cahier des charges nutritionnel & organoleptique : des essais et des séances de dégustation pour valider l’ intérêt auprès des consommateurs potentiels sont en cours au sein de Vetagro Sup. spécialisé en nutrition. 

C’est super d’y avoir accès, il y a du matériel pour travailler sur différents types de produits, pas mal de tests sont possibles ici.

A terme, on souhaiterait créer localement un Innovative Lab qui deviendrait une référence dans le développement de nouveaux produits alimentaires à valeur nutritionnelle ajoutée !

Votre première grosse rentrée d’argent ? Claquée ou investie ?

En général, on va au restaurant, on adore manger, découvrir de nouvelles adresses. C’est ce que l’on fait à chaque beau contrat signé.

Votre premier salon international, sympa ou affreux ? la chose la plus importante à avoir en tête avant de partir ?

Nous avons fait beaucoup de salons, pour la veille et la prospection. Notamment le SIAL qui est énorme. On zigzaguait dans les allées, en essayant de voir un maximum de personnes. Mais en fait, sur ces gros salons, ce sont plutôt les commerciaux  qu’on voit … Désormais on préfère des salons plus petit, plus ciblés et … on est mieux préparées. Nos incontournables : Natexpo, Vitafood, CFIA à Rennes

Votre première pensée chaque matin ?  

Plutôt en mode maman : T’as préparé le goûter ? C’est toi qui les amène ?

Votre première envie de fuir ? 

Oui c’est déjà arrivé !  Le plus souvent en lien avec des clients difficiles: les  services marketing de grands groupes, qui nous traitent comme des moins que rien pour alimenter leur démarche de greenwashing  … Non ! on évite désormais

C’est d’ailleurs notre vision du luxe : pouvoir choisir nos clients et refuser les missions suicide.   

Votre premier signe de reconnaissance ?

Notre prix national Talents, financé par BPI. Cela avait une saveur particulière parce qu’on avait dû vraiment se battre pour être reconnue comme une entreprise de service  innovante.

Nos parents étaient là. Ca se passait à Bercy et ma maman a dit, “ quand même, on est au Ministère des Finances !” 

D’ailleurs, nos familles nous ont toujours soutenues, même si nous avons  pris un chemin différent de celui qui nous était destiné.

Et sinon, le signe de reconnaissance qu’on aime beaucoup, c’est celui du client qui nous dit en fin de mission “C’est exactement ce dont j’avais besoin” ou “ça m’a beaucoup éclairé” 

Votre première apparition média ?

C’était local : La Montagne & France Bleu Auvergne ! Une grande fierté aussi, surtout pour les proches.  Une anecdote: nous sommes passées récemment dans une fromagerie dans laquelle travaillait une cousine: elle nous a ressorti l’article qui avait presque 10 ans, qu’elle avait conservé soigneusement !

Votre premier gros flip ?

Nous n’avons pas un tempérament à flipper. Du stress, de la charge mentale, des trucs pesants … du genre la tréso, le chiffre … oui mais pas plus.

On a connu des tempêtes et des naufrages  mais nous sommes de bons moussaillons !

Votre premier salaire dans la boite ?

Tout de suite ! Dès Mars 2010. Nous avons créé Nutrifizz pour ça, pour créer notre activité à notre échelle en Auvergne. Tout travail mérite salaire, plus ou moins haut certes…

Vos premiers fans ?

Nos enfants …  Ils s’amusent à chanter “merci patron”

Et sinon, respectivement:  mon associée !

Je ne l’aurai jamais fait avec personne d’autre. Malgré toutes les tempêtes, le lien reste, c’est un peu comme des frères et soeurs: avoir foi en l’autre, savoir qu’on peut compter sur elle. C’est une chance cette rencontre, on ne connaît pas la fameuse solitude du créateur. C’est précieux.

Nous fonctionnons beaucoup par défi, on se dit très souvent “cap ou pas cap “ et “ Et si … ? Ah ouais !

Mais le fait d’être deux nécessite aussi une discussion permanente. Le compromis n’est jamais facile mais tellement plus riche. Ceci dit, il y a eu des moments de ras le bol de décider:  le soir, je ne voulais même plus choisir entre reine et margarita !

Plus d’infos

www.nutrifizz.fr Un site tout neuf, en ligne début mars !